Pourquoi les automobilistes aiment-ils le bus gratuit ?

Quatre années après l’instauration de la gratuité du réseau de transports en commun dunkerquois, une nouvelle étude qualitative financée par l’ADEME s’intéresse aux raisons qui font préférer le bus aux automobilistes dunkerquois.

Réalisée par l’association de chercheurs VIGS (Julie Calnibalosky, Emre Korsu), cette étude s'intéresse à l’évolution du rapport des habitants à l’automobile entre 2018 et 2022. Dans quelle mesure la gratuité a-t-elle participé à leur faire reconsidérer de manière plus positive les transports en commun jusqu’à devenir, pour certaines et certains, une réponse adaptée à leurs besoins de déplacements ?

Dans quelles situations et pour quelles raisons le bus gratuit est-il préféré à la voiture individuelle par des habitants titulaires du permis et propriétaires d’un véhicule ? A contrario, quels freins subsistent encore à la disparition du réflexe automobile ?

Automobilistes et usagers réguliers du bus

L'enquête montre d'abord que les automobilistes enquêtés, peu habitués avant 2018 à emprunter les transports publics, en sont devenus des usagers plus réguliers. La gratuité a été l’un des arguments clés de ce changement, qui se manifeste par le fait nouveau d’alterner plus souvent des trajets réalisés en voiture et en bus. Une partie des petits trajets précédemment réalisés en voiture se font désormais plus volontiers par les transports en commun.

Gains financiers et simplicité d’usage

Une partie des personnes interrogées témoigne de la difficulté de surmonter certains coûts organisationnels impliqués par le changement de comportement, mais elles soulignent aussi le rôle positif joué par la gratuité des transports – gains financiers, simplicité d’usage – dans ce processus. Rendus sensibles à l’usage des transports publics pour la première fois à partir de la mise en œuvre du nouveau réseau gratuit, de nombreux ménages dunkerquois se détournent d’une mobilité exclusivement automobile.

Enrichir la notion de report modal

Plus largement, l’étude invite à enrichir la notion de report modal par l’apport des sciences politiques, en explorant la manière dont la gratuité peut constituer un atout sérieux dans la promotion de l’usage des transports en commun et la lutte contre la dépendance automobile, tout en affirmant que ces interactions dépendent aussi d’autres facteurs, comme les autres politiques de transports et d’urbanisme menées au-delà de la seule mesure de gratuité.

L'étude s'est spécifiquement intéressée aux automobilistes-usagères et usagers du bus gratuit, c'est-à-dire aux personnes étant effectivement en situation de pouvoir faire un arbitrage entre l'usage de leur véhicule personnel et les transports en commun.

L'enquête de terrain a comporté deux volets méthodologiques, qui combinent démarches quantitatives et qualitatives : 

• Passation d'un questionnaire auprès de ces usagers spécifiques. Au total, plus de 2000 personnes ont été approchées afin de trouver un nombre suffisant de personnes majeures, titulaires du permis et ayant le choix entre la voiture et les transports publics. 589 personnes correspondant à ce profil constituent l’échantillon dont sont issus les résultats.
• 23 entretiens individuels entre les mois de mai et juillet 2022.
• 3 focus groups thématiques avec 13 personnes, rencontrées en face-à-face dans les locaux de l'Agence d'urbanisme et de développement de la région Flandre-Dunkerque.